Le CD-E ou CD-RW pour 1997

En développement depuis plus d'un an dans les laboratoires de grandes firmes internationales, le Compact Disc effaçable devrait faire son apparition sur le marché au cours du premier semestre 97.

Article publié dans le magazine MOS 148. © MOS - ARCA 1996 - Tous droits réservés.

Après un an d'attente, le Compact Disc Effaçable semble au point. Ce n'est pas le cas de son nom puisque le media que certains nomment CD-E est présenté sous l'acronyme CD-RW pour Compact Disc ReWritable aux USA. Quelle que soit sa terminaison, ce CD est une continuation des disques de douze centimètres de diamètre que l'on connaît, ceux dont une seule face est exploitable. Ce disque d'une capacité de 650 méga-octets sera enregistrable et effaçable. Il se conforme aux spécifications de l'Orange Book partie III, l'ouvrage réunissant les caractéristiques techniques et logiques des Compact Disc enregistrables mais il respecte aussi de nouvelles spécifications appelées Multiread CD, développées par Philips et Hewlett Packard. Son format logique sera l'UDF ou Universal Disk Format (MOS N°146, page 12) dans sa version 1.5.

L'annonce des caractéristiques finales du CD-E ou CD-RW a été faite à San Francisco (CA) le 22 octobre dernier par Hewlett Packard, Mitsubishi Chemical/Verbatim, Philips, Ricoh et Sony. Comme nous l'avions annoncé à plusieurs reprises, la technique d'enregistrement retenue est le changement de phase qui permet la réversibilité des informations enregistrées. Ce choix s'explique par le souhait des industriels de produire des appareils simples qui soient néanmoins capables de relire des CD-ROM et d'écrire des CD-WORM. Mais également par la nécessité de produire des disques dont le prix de vente soit à la portée du grand public. De plus, le changement de phase permet la réécriture directe des données sans cycle d'effacement, ce qui assure un taux de transfert plus élevé lors des opérations de sauvegarde.

Les enregistreurs/lecteurs que les industriels prévoient de commercialiser au cours du premier semestre 97 seront multifonctions. Ils pourront être utilisés pour lire et enregistrer des CD-WORM et des CD-E/CD-RW et pour lire des CD-ROM. Par contre les CD-E ou CD-RW qui auront été gravés avec cet appareil ne pourront pas, pour l'instant, être lus par de simples lecteurs de CD-ROM en raison de la faible réflectivité des médias à changement de phase. Ce problème sera vraisemblablement réglé avec les futures générations de lecteurs de CD-ROM ou de DVD-ROM qui utiliseront la technologie Multiread CD proposée par Hewlett Packard et Philips. Elle permet de compenser la faible réflectivité des disques CD-E/CD-RW par une amplification électronique du signal grâce à la technologie appelée &laqno;Automatic Gain Control System». Celle-ci contrôle dès l'insertion d'un disque la réflectivité de la couche et adapte son dispositif d'amplification à cette réflectivité. La technologie Multiread CD suppose quelques modifications au niveau des logiciels de gestion du contrôleur du lecture. Stockés dans des circuits de type ROM ou PROM, ces logiciels sont conçus pour lire des disques enregistrés au format CD-UDF par une méthode incrémentale. Philips a également intégré dans son lecteur/enregistreur multifonctions pour CD-R et CD-E la technologie &laqno;Running Optimum Control» qui contrôle en temps réel la réflectivité du disque. Elle adapte la puissance du laser d'écriture à la nature du terrain, c'est-à-dire à l'irrégularité de la réflectivité sur la surface du disque, à la présence d'empreintes digitales ou de poussières sur le substrat du média. Par cette technique, les enregistrements sont toujours d'une qualité optimale, même en cas de variation de réflectivité de la couche.

La technique Multiread CD a été soumise à l'OSTA (Optical Storage Technology Association) en vue d'être normalisée. Hitachi, Mitsumi, Philips, Pioneer, Sanyo et Sony ont fait part de leur intention d'intégrer la technologie Multiread CD dans leurs prochaines générations de lecteurs de CD-ROM ou de DVD-ROM pour qu'ils puissent relire les CD-E/CD-RW. D'autres industriels devraient suivre dans les prochains mois.

Adoption du format logique UDF

Que le format logique UDF ou Universal Disk Format ait été retenu pour le CD-E est une première et une bonne nouvelle. D'une part, il va permettre aux utilisateurs de s'affranchir de certaines limites techniques de la norme ISO-9660; d'autre part, il instaure la portabilité des médias d'un environnement à l'autre, pour tous les environnements pour lesquels des programmes de gestion seront disponibles. Ce sera le cas pour les plates-formes Windows, Macintosh et vraisemblablement Unix. Rappelons que l'UDF est également le format logique choisi par les industriels pour les futurs DVD-ROM, DVD-R et DVD-RAM et qu'il est même utilisé par certains éditeurs de logiciels de gestion de disques optiques numériques (voir MOS N°144, pages 52/56).

Les concepteurs du CD-E/CD-RW ont décidé de pratiquer l'écriture incrémentale des données ou des fichiers par la méthode dite &laqno;d'écriture par paquets». Elle rendra le transfert et la sauvegarde des fichiers plus simples en les assimilant à un enregistrement sur un support magnétique amovible reconnu dans les gestionnaires de fichiers Windows par une lettre. L'utilisateur pourra effectuer le transfert des données en déplaçant l'icône des fichiers ou par les commandes spécifiques à chaque système d'exploitation. Il est vraisemblable que certains concepteurs de logiciels réfléchissent à d'autres méthodes d'écriture qu'ils ne dévoileront que plus tard. Les disques CD-E/CD-RW de format UDF enregistrés selon la méthode de transfert par paquets seront lisibles sur les enregistreurs/lecteurs conçus pour ce nouveau média. Ils pourront aussi être relus par des lecteurs de CD-ROM utilisant la technologie Multiread CD.

On devrait voir apparaître prochainement les premiers prototypes d'enregistreurs/lecteurs multifonctions de CD-E/CD-RW et CD-WORM dans des expositions internationales. La commercialisation est prévue pour le premier semestre 97 lorsque les logiciels de gestion et d'enregistrement pour différents systèmes d'exploitation seront au point. Philips prévoit d'en fabriquer dans ses usines de Belgique et de Hongrie et de commercialiser des kits de pièces détachées (blocs optiques, cartes contrôleur, etc.) sur le marché OEM au travers de sa division Key Modules. Les dirigeants de Sony prévoient de mettre en fabrication un enregistreur de CD-E/CD-RW au mois de mai 97; l'on devrait également trouver un tel appareil au catalogue de Ricoh à la suite d'un accord avec Philips (voir MOS N°139, pages 33/34). Pour sa part, Hewlett Packard proposera des solutions internes et externes mais n'a pas dévoilé quel sera son fournisseur OEM. Pour l'approvisionnement en médias, on peut compter sur Ricoh et Mitsubishi Chemical/Verbatim. Cette liste est bien sûr provisoire et susceptible s'allonger à tout instant. .

Ce nouveau média et surtout son enregistreur multifonction sont promis à un bel avenir sur les deux marchés, professionnel et grand-public. Le prix des premiers appareils devrait se situer aux alentours de 1.000 dollars sur le marché américain, carte interface SCSI et logiciel de gestion et de sauvegarde inclus. L'arrivée du DVD-R et du DVD-RAM ne constitue pas selon les industriels à l'origine du CD-E/CD-RW un obstacle majeur à la commercialisation de ce média. Le DVD-RAM, dont la capacité de stockage devrait être de 2,6 giga-octets par face, ne sera pas disponible avant 1998. Lorsqu'il le sera, le prix de l'enregistreur/lecteur et du média devrait le cantonner à des applications professionnelles. Cela dit, il est évident qu'à moyen terme les deux médias se poseront en concurrents directs. En attendant, les industriels du CD-E/CD-RW tablent sur un engouement rapide du public pour ce média et son enregistreur multifonctions qui y verrait un périphérique de base pour micro-ordinateurs en remplacement du simple lecteur de CD-ROM. En outre, les industriels estiment avoir la marge de manuvre qu'il convient pour encaisser des baisses régulières que le prix de cet appareil devra subir avant d'arriver dans trois ans à un prix &laqno;grand-public».

CD-E ou CD-RW ?

Lorsque les travaux sur ce nouveau média dérivé ont débuté, les industriels avaient décidé de l'appeler Compact Disc Effaçable (Erasable en anglais) et d'utiliser l'acronyme CD-E. Récemment, ils ont changé d'avis et l'ont baptisé Compact Disc ReWritable (réinscriptible); d'où l'acronyme CD-RW. A notre avis, l'appellation Compact Disc Effaçable ou CD-E est plus appropriée. Elle indique de façon nette la différence avec le Compact Disc Recordable (enregistrable), CD-R ou CD-WORM, qui n'est qu'enregistrable sans être effaçable. Trop proches, les acronymes CD-R et CD-RW seront sources de confusion dans public qui a du mal, avec raison, à s'y retrouver dans les différents types de disques.

Francis Pelletier

Article publié dans le magazine MOS 148.

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