par Francis Pelletier
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Cet article a été publié dans le magazine MOS 130
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M. Hal Rosen, chercheur au centre Almaden d'IBM
spécialiste du disque optique multicouches
présentant un prototype de lecteur lors du Comdex'94
Photo: © F.P.
Comme l'a démontré M. Hal Rosen, l'un des responsables
du projet chez IBM, lors du Comdex Fall'94, le concept du disque
optique multicouche ou ML (pour Multi-Level) d'IBM fonctionne
et pourrait être appliqué pour augmenter la densité
des média actuels. Cette démonstration a été
faite à l'aide d'un lecteur de CD-ROM (12 cm) modifié pour
pouvoir relire un disque comptant deux couches et offrant une capacité
de 1,2 giga-octets, soit presque deux heures et demie de vidéo MPEG-1.
La lecture consécutive de l'une ou l'autre des couches demande une
refocalisation du faisceau laser qui ne peut se faire que par une tête
optique adaptée. Tout cela a été mis au point par les
chercheurs du centre Almaden (San José, CA) et IBM le propose à
l'industrie du disque optique sous forme de licence. Dans ce centre, nous
avons rencontré le Dr. Wilfried Lenth, responsable des recherches
sur les disques optiques, auprès duquel nous avons recueilli les
informations suivantes à propos de certains aspects techniques.
Le principe du disque optique ou du CD-ROM multicouche tel que l'expose
IBM s'applique non seulement aux média à simple lecture mais
également aux disques de type WORM. Comme le montre le schéma
page 26, un disque optique double couche est constitué par l'assemblage
de deux substrats dont les faces porteuses de microcuvettes et de pistes
sont collées dos à dos. Ces faces sont séparées
par un espace d'environ 400 microns pour qu'il ne se produise pas d'interférences
lors de la lecture. Elles ne portent pas de couche réflective pour
que le faisceau du laser puisse traverser une couche pour lire l'autre.
Pour lire consécutivement l'une ou l'autre des couches, le laser
est refocalisé avec précision par un servomécanisme,
ce qui en théorie ne pose pas vraiment de problèmes. Cependant,
l'absence de couche métallique se traduit par une faible réflexivité
des matériaux qu'il faut compenser. Les chercheurs d'IBM ont exploré
deux voies. La première consiste à utiliser un laser plus
puissant afin d'obtenir en retour un faisceau de bonne lisibilité.
La seconde suppose une amplification (X15) du signal de retour transformé
en modulations par les photodiodes. Cette seconde voie demande l'installation
de circuits électroniques supplémentaires dans le lecteur
mais reste moins onéreuse que celle demandant un laser plus puissant.
Pour exploiter des disques optiques multicouches sur un lecteur de CD-ROM,
il est nécessaire d'ajouter de nouvelles commandes SCSI et de remanier
les microcodes. A cela s'ajoutent des corrections d'aberration. Tous ces
aspects ont été étudiés chez IBM qui propose
sa technologie à l'industrie sous forme de licence.
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Prototype de lecteur de CD-ROM multicouches
développé par IBM - Photo: © F.P.
Les tests réalisés à Almaden ont démontré
la faisabilité d'un disque de type CD-ROM fait de six couches et
offrant une capacité de 3,6 giga-octets. Dans ce cas, c'est un laser
d'une puissance de trois milliwatts et d'une longueur d'onde de 647 nm qui
lit les informations. Cette structure optique est faite de l'empilement
de quatre plateaux (substrats de faible épaisseur) séparés
entre eux par une lame d'air de 0,4 mm. Les deux substrats intermédiaires
se trouvant en sandwich ont été réalisés par
la technique dite 2P (Photopolymérisation), ce qui a permis d'obtenir
des microcuvettes de part et d'autre.
IBM a testé son concept de disque ML sur des media de deux et quatre
couches. Après avoir procédé à des expérimentations
mettant en uvre des couches sensibles à base de tellure, les ingénieurs
se sont orientés vers les polymères qui ont donné un
résultat qualitatif supérieur. Le schéma ci-contre
montre la structure adoptée pour un disque double couche. Dans sa
conception, celui-ci ne diffère guère d'un DON de ce type,
si ce n'est que l'espace qui sépare les deux couches ne doit pas
excéder 400 à 500 microns.
En effet, le laser doit pouvoir se focaliser d'une couche à l'autre
sans retournement du disque comme c'est le cas actuellement. Les ingénieurs
d'IBM ont également testé le disque optique WORM avec succès
en laboratoire dans une configuration à quatre couches, ce qui laisse
augurer de vastes possibilités pour cette technologie. Reste que
la fabrication des disques multicouches au delà de deux structures
d'enregistrement remet en question les méthodes et les chaînes
de production en fonctionnement actuellement. IBM est consciente des développements
à mener pour cette industrialisation et se propose, si elle trouve
un partenaire industriel, de mettre au point une méthode de fabrication.
Elle ne semble pas encore avoir trouvé ce partenaire puisqu'elle
n'a pas annoncé officiellement d'accord de ce type.
Le disque optique multicouche suscite beaucoup d'enthousiasme. M. Edward
M. Engler - directeur de programme au sein de l'Optical Storage Laboratory
(OSL) d'IBM - se plaît à rêver d'un disque optique multicouche
d'une capacité de trente giga-octets et de tout ce qu'on pourrait
en faire dans le stockage de masse et la diffusion d'informations.
Pour sa part, M. Wilfried Lenth, responsable
de l'ensemble des recherches sur les disques et les mémoires optiques
au centre Almaden d'IBM, estime qu'il sera possible de combiner plusieurs
nouvelles technologies entre elles - comme le disque multicouche avec la
haute densité à l'aide d'un laser émettant dans une
courte longueur d'onde - mais que les produits du commerce ne sont pas pour
demain. Les chercheurs testent les modèles théoriques mais
n'ont encore rien à communiquer sur le sujet. Ce n'est après
tout qu'une des voies possibles vers les disques optiques numériques
de demain et, en attendant, IBM continue avec pragmatisme à travailler
sur les prochaines générations de DON 3,5 et 5,25 pouces.
Elle suit les évolutions qui ont lieu au sein des comités
ISO prévoyant de passer de 230 à 650 méga-octets pour
le disque magnéto-optique 3,5 pouces et de 1,3 à 2,6 giga-octets
pour le DON 5,25 pouces.
Francis Pelletier - ©
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Cet article a été publié dans le magazine MOS 130 1995