A l'AIIM Show'96, Norsam Technologies (Santa Fe, NM) présentait
les supports d'archivage HD-ROM et Rosetta issus d'une technologie
mise au point par deux ingénieurs, le Dr. Bruce Lamartine
et M. Roger Stutz, du centre de recherches Alamos qui dépend
du département américain de l'énergie. Ici, la gravure
d'un substrat se fait à l'aide d'un faisceau d'ions modulés
dans un appareil fonctionnant sous vide. Les informations sont enregistrées
sur différents substrats comme le verre, le silicium ou des métaux
inoxydables, informations provenant d'un serveur à base de micro-ordinateur
PC et d'un système de codage/modulation qui envoie les signaux au
générateur du faisceau d'ions. La finesse de ce faisceau explique
que l'on puisse atteindre de très densité de stockage; les
inventeurs que nous avons rencontrés parlent d'un milliard de bits
par pouce carré. L'information ainsi gravée est de type permanent
et irréversible et ne peut être déchiffrée que
par des appareils adaptés à sa relecture. La gravure faite
dans la masse du substrat, à l'image de ce que fait Digipress dans
le Century Disc (MOS N°74), permet une longue conservation des données,
plusieurs centaines d'années . Entre le HD-ROM et le Rosetta, la
différencie se situe dans la façon d'enregistrer les informations.
Le HD-ROM est conçu pour porter des données numériques
sous forme de cuvettes représentant, comme dans les CD ou les DON,
des suites de chiffres binaires (0 ou 1) exploitables par des ordinateurs
qui redonnent un sens à l'information. S'agissant d'un disque, les
cuvettes sont situées sur une piste circulaire. Le Rosetta pour sa
part s'apparente à la microfiche dans la mesure où les documents,
après avoir subi une réduction à un taux très
élevé, sont stockés sous forme de micro-images. Ces
images sont générées par le système d'enregistrement
à partir de documents numérisés; elles sont reconstituées
par un balayage de type X-Y à l'aide d'un faisceau d'ions modulés.
Une micro-image a une taille d'environ 20 x 30 microns.
Selon les dirigeants de Norsam Technologies et les deux inventeurs, cette technologie permet d'obtenir une très haute densité de stockage. Dans le cas du Rosetta, une surface équivalente à celle d'un disque de 3,5 pouces (90 mm) de diamètre peut stocker 6.000 pages A4 numérisées après réduction à un taux moyen et plus d'un million de documents après réduction à un taux très fort. Dans le cas du HD-ROM, sa capacité maximale serait 10.000 fois supérieure à celle d'un CD-ROM pour une même surface; soit une capacité d'environ 6.000 giga-octets. Cela laisse rêveur! Reste à savoir comment et dans quelles conditions, l'utilisateur va pouvoir tirer profit de telles capacités.
Des lecteurs et des prestations pour la fin de cette année
Où en sont les systèmes d'enregistrement et, plus important
encore, où en sont les systèmes de relecture et d'exploitation?
Pour le moment, inutile d'espérer pouvoir acheter un enregistreur
de HD-ROM sur le marché comme on achète un enregistreur de
DON ou de CD-WORM. Cet enregistreur avec son encodeur nécessite un
investissement de l'ordre de un million de dollars et fait appel à
des technologies de traitement sous vide nécessitant une infrastructure
adaptée. Les dirigeants de Norsam Technologies envisagent donc de
commercialiser cette technologie sous forme de prestations uniquement. Ils
vont mettre en place dans leurs locaux un enregistreur de HD-ROM et de Rosetta
et proposeront leurs services aux entreprises et aux administrations comme
le font les prestataires en micrographie. Parallèlement, ils vont
fabriquer des lecteurs adaptés à ces supports. Ils prévoient
de produire trois modèles. Le premier permettrait de lire des supports
de moyenne densité d'information et serait basé, selon M.
Bruce Lamartine, sur une mécanique et un dispositif dérivés
des lecteurs de CD-ROM. Le second pourrait relire une densité de
stockage plus élevée et ferait appel à un dispositif
de type interférométrique. Quand au troisième, il utiliserait
un balayage à faisceau d'électrons pour restituer les informations.
Norsam Technologies devrait montrer les premiers prototypes en août
prochain.
En attendant, les responsables de Norsam Technologies testent ce nouveau concept auprès des prestataires de services et des responsables d'archives, en particulier auprès de ceux qui ont à conserver des fonds très importants. De leur point de vue, le Rosetta est un excellent support de substitution à la microfiche et le HD-ROM trouvera sa place en complément des disques optiques numériques.
Quel avenir pour le HD-ROM et le Rosetta ?
Les concepts du HD-ROM et du Rosetta sont au premier abord extrêmement séduisants rapportés au problème de stocker sur de longues durées, avec une bonne garantie de conservation, d'énormes masses d'informations. Les techniques sont toutefois difficiles à mettre en uvre et nécessitent des investissements lourds. Deuxième inconvénient: malgré ce qu'affirment les dirigeants de Norsam Technologies, du fait des dimensions microniques des enregistrements, il est mal aisé de réaliser des copies ou des duplications de médias. Troisième inconvénient: en imaginant même qu'une entreprise ou une administration aient décidé de supporter le lourd investissement, les opérations ne se maîtrisent pas d'emblée et l'apprentissage peut être long et délicat, ce qui sera à notre avis un frein à une large utilisation de ces supports. Enfin, cette technologie est propriétaire donc isolée et n'obéit à aucune norme. Dans ces conditions, c'est prendre beaucoup de risques que de faire transférer des archives avec l'espoir de pouvoir les consulter pendant des décennies. C'est faire le pari qu'une technique aussi particulière aura survécu aux évolutions de l'offre technologique .
Francis Pelletier
Article publié dans le magazine MOS N°144.
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